SOBRE MÍ

Mis primeros placeres cinematográficos fueron proporcionados por películas programadas en la televisión, pero algunas veces mis padres me mandaban a la cama pronto, demasiado para mi gusto. Al permanecer a la escucha de las películas desde el dormitorio descubrí el llamado espacio “off”.

Durante mi niñez disfruté viendo películas de cine negro y comedias, entre las cuales el más euforizante antídoto a la tristeza que conozco: Cantando bajo la lluvia (Singin in the rain, Stanley Donen y Gene Kelly, 1952). Sin duda, “Good mornin’” puede suavizar cualquier atisbo soterrado de melancolía.

The Far country
The Far Country (Anthony Mann, 1954)

Por aquella época mi género predilecto fue el western.  No sabía entonces que algunos de mis westerns favoritos habían sido dirigidos por Anthony Mann. Años después sus encuadres, su tempo sosegado y su concisión dramática me parecieron de una fuerza expresiva inusual.

Me conmovió mucho El milagro de Ana Sullivan (The Miracle Yorker, Arthur Penn, 1962). Tenía doce años. Me hizo sentir que el cine podía brindar emociones casi epidérmicas sin dirigirse al intelecto. Y tuve la impresión de que mediante el acceso al lenguaje Helen Keller, la niña sordiciega, nacía por segunda vez.

The miracle worker
The Miracle Worker

Con la misma edad, un día al regresar del colegio vi Rojos y blancos (Csillagosok, Katonák, Miklós Jancsó, 1967), ambientada durante la Primera Guerra mundial en la puszta húngara. Me pareció una rareza, no entendí nada pero, a pesar de su frialdad, me cautivó la coreografía de sus movimientos de cámara. Ignoraba que se llamaban planos secuencia.

Y Jancsó empleaba aquí una de las más bellas combinaciones visuales que se puedan imaginar: el formato scope en blanco y negro. Esa misma elección tomaba Robert Rossen para potenciar el drama en El buscavidas (The Hustler, Robert Rossen, 1961) que, poco después, tanto me gustó.

The hustler

Un par de años más tarde vi Marnie (Alfred Hitchcock, 1964) frente a la cual percibí que la cámara y el color permitían explorar algunas zonas turbadoras de nuestro ser, hasta alcanzar algo cuyo nombre desconocía: lo inconsciente. Además, por primera vez la versión original subtitulada me permitía saborear un concierto de voces en un idioma distinto.

Mientras dormían mis familiares la versión original, escuchada con volumen bajo, se convirtió en un reiterado placer clandestino, gracias a la programación de los Ciné Club de Antenne 2 y el Cinéma de Minuit de FR 3. Sí, entonces vivía en Francia. Memorable fue para mí el pase televisivo de La sala de música (Jalsaghar, Satyajit Ray, 1958), tres o cuatro años más tarde. Bajo la mirada del cineasta bengalí, del que ignoraba hasta el nombre, el hipnótico paso del tiempo anestesiaba la razón y lo cotidiano se cargaba de sensualidad.

Jalsaghar
Jalsaghar

Muy sensorial era también  un mediometraje que vi con nueve años creo en el patio del colegio, mientras llovía: Crin Blanca (Crin Blanc, Albert Lamorisse, 1953). Lo olvidé durante muchos años, aunque supongo que me habré identificado con el joven Folco capaz de cabalgar al indómito purasangre en las dunas de Camarga.

Si algo he aprendido con respecto a la noción de mise en scène es porque tuve la fortuna de ver Los pájaros (The Birds, Alfred Hitchcock, 1963) con trece años. Nunca ha mermado mi admiración por aquella audaz epifanía, por suerte carente de explicación racional, rayana en lo abstracto y sazonada con suspense.

The Birds
The Birds

Luego vi Un condenado a muerte se ha escapado (Un condamné à mort s’est échappé, Robert Bresson, 1956). La verdad, no recuerdo qué sentí frente al filo de tan cortante control artístico, aunque el espacio sonoro y las elipsis se fundían de manera milagrosa en un mosaico de planos muy fragmentados.

Un condamné à mort s'est échappé
Un condenado a muerte se ha escapado

Durante la adolescencia empecé a ver muchas películas en la pantalla grande. Entre los choques más  profundos se encuentran diez o quince películas americanas, ásperas y vitales, rodadas durante los años setenta. También me fascinaron la mineralización del mundo filmada por Antonioni, los frescos de Visconti y su uso pictórico del color. Y algunos rostros femeninos dejaron una huella indeleble, no menos que sus siluetas y sus voces.

Entre todas aquellas películas importantes en mi incipiente memoria de espectador quiero destacar dos: Días de cielo (Days of Heaven, Terrence Malick, 1978) y Tabú (F W Murnau, 1931), la primera parca en palabras, la segunda silente, ambas líricas y ubicadas en una naturaleza todopoderosa.

Pero por encima de todas he de colocar Bonnie and Clyde (Arthur Penn, 1967) y Andreï Rublev (Andrei Tarkovski, 1967), vistas por casualidad apenas cumplidos los diecisiete años. Valga decir que mi vida de espectador dio un vuelco y que sigo considerando el último episodio de la película de Tarkovski (la fundición de la campana) uno de los momentos más hermosos de la historia del cine.

Days of heaven
Days of Heaven

Andrei Rublev
Andreï Rublev

Después traté de concederme tiempo para conocer y comprender el cine.

Y luego empecé a escribir y a filmar…

Mes premiers plaisirs cinématographiques m’ont été procurés par des films programmés à la télévision. Parfois mes parents m’envoyaient au lit de bonne heure, beaucoup trop tôt à mon goût. De ma chambre j’entendais la suite du film et c’est ainsi que j’ai découvert l’espace « off ».

Pendant mon enfance j’ai pris beaucoup de plaisir à voir des films noirs et des comédies, parmi lesquelles le film le plus euphorisant que je connaisse : Chantons sous la pluie (Singin in the rain, Stanley Donen y Gene Kelly, 1952). Sans aucun doute, la scène de « Good mornin’» peut adoucir les effets d’une attaque pernicieuse de mélancolie.

The Far country
Je suis un aventurier (Anthony Mann, 1954)

A cette époque mon genre de prédilection était le western. Je ne savais pas alors que certains de mes westerns favoris avaient été réalisés par Anthony Mann. Quelques années plus tard ses cadrages, son tempo mesuré et sa concision m’ont paru d’une force expressive inhabituelle.

Miracle en Alabama (The Miracle Yorker, Arthur Penn, 1962) m’a beaucoup ému. J’avais douze ans. Le film m’a fait sentir que le cinéma pouvait apporter des émotions presque épidermiques sans s’adresser à l’intellect. Et puis j’ai eu l’impression que grâce au langage, Helen Keller, l’enfant sourde, aveugle et muette, naissait une deuxième fois.

The miracle worker
Miracle en Alabama

A douze ans j’ai vu Rouges et blancs (Csillagosok, Katonák, Miklós Jancsó, 1967), situé pendant la Première Guerre mondiale dans la puszta hongroise. Le film m’a paru une bizarrerie, je n’ai rien compris mais, en dépit de sa froideur, j’ai été captivé par la chorégraphie des mouvements de caméra. J’ignorais qu’on les désignait sous le nom de « plan séquence ».

Et Jancsó utilisait l’une des plus belles compositions visuelles qui soient : le format scope en noir et blanc. Afin de renforcer la puissance dramatique Robert Rossen optait pour le même choix dans L’Arnaqueur (The Hustler,1961), que j’ai tant aimé.

The hustler

Deux ou trois ans plus tard j’ai vu Pas de printemps pour Marnie (Marnie, Alfred Hitchcock, 1964) face auquel j’ai perçu que la caméra et la couleur permettaient d’explorer des zones troubles de notre être, jusqu’à atteindre quelque chose dont j’ignorais le nom : l’inconscient. De plus, pour la première fois grâce la version originale sous-titrée me permettait de savourer un concert de voix dans une langue étrangère.

Tandis que les membres de ma famille dormaient, la version originale, écoutée à un volume bas, est devenu un plaisir clandestin renouvelé, grâce à l’excellente programmation des Ciné Club d’Antenne 2 et du Cinéma de Minuit de FR 3. Oui, je vivais alors en France. Trois ou quatre ans plus tard, la diffusion du Salon de musique (Jalsaghar, Satyajit Ray, 1958) a été pour moi un moment mémorable. Sous le regard du cinéaste bengalais, dont même le nom m’était inconnu, l’hypnotique passage du temps anesthésiasit la raison et le quotidien se chargeait de sensualité.

Jalsaghar
Le Salon de musique

Très sensoriel était aussi un moyen-métrage que j’ai vu à neuf ou dix ans dans le préau du collège, tandis qu’il pleuvait : Crin Blanc (Albert Lamorisse, 1953). Je l’ai oublié pendant de nombreuses années mais je suppose que je me suis identifié au jeune Folco qui dressait en douceur l’indomptable pur sang dans les dunes de Camargue.

Si j’ai appris quelque chose en ce qui concerne la notion de mise en scène c’est parce que j’ai eu la chance de voir  Les Oiseaux (The Birds, Alfred Hitchcock, 1963) à l’âge de treize ans. Jamais n’a fléchi mon admiration pour cette audacieuse épiphanie, saupoudrée de suspense, qui frôle l’abstraction et fort heureusement nous prive d’une explication rationnelle.

The Birds
Les Oiseaux

Ensuite j’ai vu Un condamné à mort s’est échappé (Robert Bresson, 1956). A dire vrai, je ne sais plus ce que j’ai ressenti face à un contrôle artistique aussi tranchant, même si l’espace sonore et les ellipses se fondaient de manière miraculeuse dans une mosaïque de plans très fragmentés.

Un condamné à mort s'est échappé
Un condamné à mort s’est échappé

Pendant mon adolescence j’ai commencé à voir de nombreux films sur grand écran. Parmi les chocs les plus profonds me viennent à l’esprit dix ou quinze films américains, âpres et vitaux, réalisés au fil des années soixante-dix. J’ai aussi été fasciné par la minéralisation du monde filmée par Antonioni, par les fresques de Visconti et son utilisation picturale de la couleur. Et certains visages de femmes ont laissé une empreinte durable, non moins que leurs silhouettes et leurs voix.

Parmi tous les films importants dans ma mémoire naissante de spectateur je voudrais en distinguer deux : Les Moissons du ciel (Days of Heaven, Terrence Malick, 1978) et Tabou (F W Murnau, 1931), le premier presque silencieux, le deuxième muet, tous deux lyriques et situés dans une nature toute-puissante.

Mais par dessus tout il me faut placer Bonnie and Clyde (Arthur Penn, 1967) et Andreï Roublev (Andrei Tarkovski, 1967), vus par hasard à l’âge de dix-sept ans. Qu’il me suffise de dire que ma vie de spectateur en a été bouleversée et que je continue à considérer le dernier épisode du film de Tarkovski (la fonte de la cloche) l’un des plus beaux moments de l’histoire du cinéma.

Days of heaven
Les Moissons du ciel

Andrei Rublev
Andreï Roublev

Ensuite j’ai tâché de m’accorder du temps pour connaître et comprendre le cinéma.

Puis j’ai commencé à écrire et à filmer…

My first cinematographic pleasures were provided to me by films that were programmed on television, but unfortunately many times my parents would send me early to bed, too early for my taste. As I lay in bed listening carefully from my room I discovered what was to be called the “off space”.

Throughout my childhood I very much enjoyed the “film noir” flicks and comedies, and amongst these the strongest antidote to sadness that I know: Singin’ in the rain (Stanley Donen and Gene Kelly, 1952). Without the least doubt “Good mornin’” can ease off whatever melancholy inkling one may have.

The Far country
The Far Country (Anthony Mann, 1954)

In those days my favourite genre were westerns. I didn’t know at that time that many of my most cherished westerns had been directed by Anthony Mann. Years later his framing, his easy tempo and his dramatic succinctness seemed to have for me a very unusual expressive strength.

I was very much moved by The Miracle Worker (Arthur Penn, 1962). I was twelve at the time. I felt that cinema could bring skin level emotions to you without going through the filter of the intellect. I had the impression that through the access to language Helen Keller, the deaf and blind girl was reborn, in a way.

The miracle worker
The Miracle Worker

I was the same age when I saw The Red and the White  (Csillagosok, Katonák, Miklós Jancsó, 1967), set during the Great War in the Hungarian puszta. It seemed a rarity, I didn’t understand a thing, but despite its coldness, I was captivated by the choreography of its camera movements. I had no idea at the time that they were called “sequence shots”

And Jancsó used here one of the most beautiful visual combinations that one can imagine: the scope format in black and white. This same choice was taken by Robert Rossen to potentiate the dramatic aspect in The Hustler (1961), that I so much enjoyed.

The hustler

Two or three years later I saw Marnie (Alfred Hitchcock, 1964) in which I perceived that the camera and colour allowed for further exploration into disturbing zones of our being, reaching something which name I then ignored: the unconscious. It was also the first time I was presented with the original soundtrack which submerged me into a concert of voices in a different language.

While my parents were asleep, the original soundtracks which I listened to with the volume turned down became a reiterated clandestine pleasure, thanks to the programming of the Ciné Club de Antenne2 and the Cinéma de Minuit de FR 3, as I was then living in France. Memorable then was also the television screening of The Music Room (Jalsaghar, Satyajit Ray, 1958). Under the vision of the Bengali filmmaker, of whom I then ignored the name, the hypnotic passing of time anesthetized reason and charged with sensuality everything that was quotidian.

Jalsaghar
The Music Room

What I also found sensorial was a short film I saw when I was nine or ten years old in the school’s playground while it was raining: Crin Blanc (Albert Lamorisse, 1953). I forgot about it for many years, although I suppose that I have identified myself many times with young Folco capable of riding the indomitable thoroughbred through the dunes of Camarga.

If I ever learned anything regarding “mise en scène” it was because I was fortunate enough to see The Birds (Alfred Hitchcock, 1963) when I was thirteen. Never has my admiration diminished for that bold epiphany, luckily lacking any rational explanation, bordering the abstract and peppered with suspense.

The Birds
The Birds

Later I saw A Man escaped (Un condamné à mort s’est échappé, Robert Bresson, 1956). The truth is I can’t remember what I felt when faced with the edge of such a cutting artistic control, although the soundscape and ellipsis fused in the most miraculous way creating a mosaic of very fragmented shots.

Un condamné à mort s'est échappé
A man escaped

During my adolescence I began to watch films on the big screen. I can think of ten or fifteen American titles that caused the biggest impression on me, they were rugged and vital productions shot during the seventies. I was also fascinated by the mineralization of the world filmed by Antonioni, Visconti’s frescos and his pictorial use of colour. Some female faces left an indelible mark in me, not to mention also their silhouettes and their voices.

Among all those important films in my incipient memory as a spectator I would like to highlight two: Days of Heaven (Terrence Malick, 1978) and Tabú (F W Murnau, 1931), the former laconic the latter hushed, both lyrical and set in an almighty nature.

But above all I have to place Bonnie and Clyde (Arthur Penn, 1967) and Andreï Rublev (Andrei Tarkovski, 1967), both viewed by chance and before my seventeenth birthday. Suffice it to say that my life as a spectator changed completely and that I still consider the last episode of Tarkovski’s film (the casting of the bell) one of the most beautiful moments in film history.

Days of heaven
Days of Heaven

Andrei Rublev
Andrei Rublev

Then I tried to give myself time to gain knowledge and understanding of film. Later I began to write and shoot…..